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Date 15.04.2024
Concerne :
Procédure b. 980 – émission TJ 19h30 du 13 octobre 2023 de la Radio
Télévision Suisse (RTS), interview de la rabbin et philosophe Delphine
Horvilleur
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Madame la Présidente,
Mesdames les juges,
Messieurs les juges,
Référence est ici faite à votre courrier du 11 mars 2024 nous transmettant la réplique de Madame Bordier (ci-après « la Plaignante ») et nous impartissant un délai au 1er avril 2024 pour déposer une éventuelle duplique.
La présente écriture étant déposée ce jour auprès d’un office de poste, celle-ci est recevable.
La Société suisse de radiodiffusion et télévision (ci-après : la SSR) persiste intégralement dans ses conclusions prises en date du 22 février 2024 et pour le surplus se détermine comme suit sur la réplique de la Plaignante.
En tant que de besoin, la SSR rappelle que Madame Horvilleur était invitée par l’émission « 19h30 » pour délivrer une réaction personnelle à la suite de l’attaque du 7 octobre 2023. La fonction de rabbine de l’invitée et ses liens avec l’État d’Israël, pays où elle a vécu, ont été donnés par la journaliste en introduction de l’interview. Il était dès lors pleinement perceptible pour le public que Madame Horvilleur délivrait là un témoignage personnel comportant, de fait, une part de subjectivité.
La SSR rappelle qu’eu égard au principe énoncé à l’art. 4 al. 2 LRTV, l’AIEP examine si le public a pu se faire l’idée la plus juste possible des faits ou d’un sujet et, si ce dernier est à même de se forger son propre avis. Des erreurs portant sur des éléments mineurs, de même que des imperfections au niveau rédactionnel, qui ne sont pas susceptibles d’influencer notablement la vue d’ensemble fournie par l’émission, sont sans incidence du point de vue du droit des programmes. Quant à l’ampleur de la diligence requise, celle-ci dépend des circonstances concrètes, du caractère et des particularités de l’émission, ainsi que des connaissances préalables du public (ATF 13111253 précité, cons. 2.1ss, p. 257).
En l’espèce, le message de Madame Horvilleur était avant tout un message de paix. Nous convenons rétrospectivement qu’il aurait été souhaitable d’appeler à la prudence quant à l’élément des « bébés égorgés ». Toutefois, il ne peut être reproché à la SSR d’avoir failli. En effet, il s’agissait là d’un élément tout â fait secondaire du discours de la rabbine. Cet élément n’était pas avéré comme manifestement faux au jour de l’interview et apparaissait donc comme plausible. De plus, il convient de relever que l’angle éditorial du sujet portait sur son ressenti personnel quelques jours après l’attaque : l’émotion était-elle toujours aussi vive ? Considérait-elle l’attaque comme un tournant dans le conflit ? Avait-elle peur pour la communauté juive en France ? La paix était-elle encore possible selon elle ? Aussi, l’angle éditorial et les questions posées ne se prêtaient pas à rebondir sur cet élément mineur du discours de la rabbine, qui de surcroît ne pouvait être considéré comme faux.
Cela étant, la SSR insiste sur le fait que l’angle éditorial du sujet contesté n’était pas d’expliquer le contexte dans lequel était intervenue l’attaque du HAMAS, mais de recueillir un témoignage personnel.
Au demeurant, la SSR relève que le principe de diversité garanti par l’art. 4 al. 4 LRTV s’examine à l’aune de la couverture du conflit dans son ensemble, laquelle ne porte pas flanc à la critique en l’espèce.
S’agissant du fait que la rabbine appartienne à l’organisation libérale du fait que la rabbine appartienne à l’organisation libérale « Judaïsme en mouvement » confirme que l’invitée est une personnalité modérée. A ce titre, nous relevons que Madame Horvilleur continue d’être interviewée par des médias de services publics francophones. Aussi, son statut d’observatrice est légitimé dans la francophonie.
Enfin force est de constater que la Plaignante ne partage pas, selon son bon droit, les opinions de l’invitée, dont elle qualifie les propos de « partiaux et dénués de fondements ». A ce titre, la SSR rappelle que la liberté d’expression est un droit fondamental allant au-delà de l’opinion
personnelle du public.
Au vu de ces éléments et comme indiqué en tête de la présente, la SSR persiste dans ses conclusions prises en date du 22 février 2024.
Nous vous prions de croire, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Juges, à l’assurance de notre parfaite considération.
Pour la SSR SRG
Gabrielle Picard
Juriste